Le loup, les vaches et le veau

C ’était un loup que sa maigreur
Emmenait droit au tombeau.
Mais de quel mal souffrait cet étrangleur d’agneaux ?
Des ans sûrement, peut-être même de langueur.
En chemin, il croisa sur une pente
Des vaches bien grasses et indolentes,
Constantes rêveuses, mâchant éternellement
L’herbe fraîche des champs.
Voilà, pensa le vieux loup fatigué,
Le paradis sur terre, j’arrête de chercher !
Fini les traques, les courses solitaires,
Profitons de cette herbe à ne savoir qu’en faire.
S’adressant aux vaches, il leur demanda :
– Mes amies, puis-je partager votre repas ?
Une vache lui répondit tout étonnée :
– Brouter, c’est une fatigue de toute la journée !
– Qu’à cela ne tienne, je fais serment,
Dit le loup, d’apprendre en vous regardant.
Aussitôt, il se mit au travail,
Pressé de remplir ses entrailles.
L’apprentissage s’avéra lent et redoutable,
De cet art, le loup n’était pas capable !
Plus il broutait, plus il avait faim,
C’était un supplice sans fin.
Gorge brûlante, douleurs dans la mâchoire,
Il courait sans cesse à l’abreuvoir,
Maudissant les vaches et leur hospitalité.
C’est alors qu’il aperçut un veau né le matin
Qui réveilla aussitôt son instinct.
N’écoutant que sa faim, il se jeta sur lui
Et l’emmena au fond de la prairie.
Tant d’humains entonnent des refrains
Dont ils ignorent tout,
Ainsi que dans cette fable l’a fait le loup.

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