La pie et le corbeau

Monsieur le corbeau en son territoire,
Promenait sa majesté noire.
Survint une pie volage,
Effrontée, babillarde et davantage.
— Vous ici, demanda le maître des lieux ?
— Et vous, rétorqua la pie venue des cieux ?
— C’est mon domaine, jura le corbeau rugueux.
— C’est ma plaine, clama la pie d’un air fougueux.
— Jamais ! brailla le corbeau courroucé,
Retournez chez vous sans vous attarder,
Sinon vous verrez, je vais m’échauffer !
— Fi, Monsieur le corbeau !
Echauffez-vous !
Quant à moi, je vais folâtrer partout.
Sur ces mots la pie s’envola,
La course s’engagea.
Le combat de blanc et de noir enchevêtré,
Dans le ciel fit un spectacle saccadé.
Partout volèrent plumes blanches, plumes noires,
La bataille fut rude et prémonitoire,
Si grande l’hécatombe de plumage,
Qu’il fallût que le combat cessât,
Sinon de plumes il ne resta.
Epuisés, pie et corbeau tombèrent à terre.
Ni vainqueur, ni vaincu ne se déclarèrent.
L’affrontement avait été si âpre et si sauvage,
Que la paix ne pouvait être qu’avantage.
Aux deux compères ayant tant souffert,
Un traité fut offert.
Corps et plumes en lambeaux,
Ils le signèrent dans le plus proche hameau.
Immense est notre terre,
Petits nos territoires,
La paix toujours méritoire.

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